Chronique

[Chronique] Les nomades du fer, Eleanor Arnason

Pour cette chronique, nous allons discuter d’un roman paru il y a quelques jours chez Argyll (que je remercie pour l’envoi du service presse): Les nomades du Fer d’Eleanor Arnason, traduit par Patrick Dechesne. 

Les nomades du fer est le 4e roman de l’autrice, publié en 1991 et lauréat des prix James tiptree Jr et de la mythopoeic society.

Cette œuvre m’intriguait beaucoup, car le résumé était accompagné de la recommandation de deux autrices que j’aime beaucoup, Ursula K Le Guin et Jo Walton, rien que ça. Il ne fallait rien de plus pour titiller ma curiosité et me donner envie de le lire. En plus de cela, je sais qu’Argyll a le chic pour mettre en avis des textes originaux, intéressants, qui titillent le cerveau. Comme d’habitude, l’ouvrage se pare d’une couverture magnifique à la belle couleur orange signée Xavier Colette

Le roman met en scène Lixia, une anthropologue qui arrive sur une planète autour de l’étoile Sigma Draconis avec plusieurs de ses collègues. Chacun d’entre eux se voit déposé à un endroit de la planète, pour l’explorer seul, observer les sociétés qui s’y développent et  tenter d’entrer en contact avec les habitants, sans interférer avec leurs habitudes ni perturber leur mode de vie et technologie. 

Sur la planète vivent en effet des êtres humanoïdes, qui ressemblent pas mal aux humains à l’exception du fait qu’ils sont recouverts d’une épaisse couche de poil. On y découvre leurs habitudes, leur culture, mais aussi la faune et la flore de la planète (un point que j’aime toujours tout particulièrement dans ce genre de roman d’exploration planétaire). 

Lixia rencontre ainsi plusieurs habitants de la planète et du peuple du fer. Ils vivent regroupés en clan, et migrent au fil des saisons. S’ils ont une base culturelle commune, et une construction du clan très marquée par la présence d’une chamane, chaque clan a tout de même ses spécificités et des personnages aux caractères forts. 

Lixia rencontre en particulier Nia, une femme qui reste à l’écart de son village, car elle n’a pas respecté la coutume et a entretenu une relation longue durée avec un homme. Si la rencontre se passe plutôt bien pour Lixia, qui apprend progressivement le langage et la culture du peuple, c’est plus difficile pour certains de ses collègues, en particuliers les hommes. Car sur cette  planète, ils sont en marge de la société et des clans. Ils ne vivent en effet pas parmi les femmes, mais vivent seuls à partir de l’âge adulte, sur des territoires qu’ils défendent et où les femmes les rejoignent à la saison de l’accouplement. Un procédé qui semble éviter les violences et les conflits. 

Anthropologie, politique, sociologie, tous ces aspects sont traités et rendent le roman dense et fascinant. Il a une construction que j’ai trouvé très intéressante. L’histoire n’est peut être pas d’un rythme incroyable dans le sens où l’exploration de la planète ne fourmille pas de scènes d’actions, mais je n’ai pas vu les pages passer. J’ai dévoré le texte. Ce sont les personnages et leurs cultures sont au cœur du récit, et ça fonctionne bien. En cela, le roman se rapproche assez des textes de Ursula k LeGuin.  

Dans les premiers chapitres, le texte se concentre sur la manière dont Lixia évolue sur la planète, ses premières interactions et ce qu’elle apprend de la culture et des habitudes du peuple. Puis forcément se pose la question de la manière d’interagir avec les peuples et de savoir si oui ou non les terriens devraient coloniser cette planète, malgré le fait qu’elle soit déjà habituée. Avec bien sûr la nécessité de prendre en compte toutes les conséquences que cela pourrait avoir sur les habitants, aux coutumes différentes et non habitués à la technologie terrienne. Les derniers chapitres se focalisent plutôt sur ce point. 

Pour les terriens, cette planète semble en effet bien prometteuse car elle est immensément riche en métaux. Il serait donc très profitable d’y poser le pied pour pouvoir l’exploiter. Mais tous les membres de l’équipage ne sont pas d’accord. Par le biais de leurs discussions et questionnements, l’autrice amène une réflexion intéressante sur la question. Sans donner forcément de solution miracle, elle propose d’y réfléchir et de questionner les limites de chaque solution proposée. On se questionne bien sûr également sur les normes sociales et la culture du peuple du Fer. Il faut dire que proposer une société où les hommes sont exclus de cette manière, c’est clairement original et osé. L’équipage du vaisseau est aussi intéressant, car l’autrice propose des personnages issus d’une société post-capitaliste aux idéologies variées.

J’ai apprécié le fait que malgré des choix atypiques, le récit est loin d’imposer un point de vue, mais reste ouvert sur les débats et les réflexions qu’il amène.

Le roman est assez long et dense, mais je ne me suis pas ennuyée car plein de petites choses nouvelles et fascinantes sont disséminées par ci par là. En conclusion, je vous recommande cette lecture, surtout si vous appréciez les romans de premiers contacts, ceux qui mettent en avant des peuples et des cultures

Autres avis: Noosfere – Ce que j’en disCharyde2 (VO)

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